Description
**dans la tête de l’Elfe**
Devenir une puissante druidesse passe nécessairement par en savoir toujours plus sur la nature et les créatures
qui la peuplent.
Ayant échoué à mon Brevet de Druidisme, je me dois d’acquérir de nouvelles connaissances.
Un tour au Museum d’histoire Ervaldienne me ferait le plus grand bien.
Par contre, ça coûte trop cher, il faut que je trouve le moyen d’y entrer gratuitement.
***
Le Pounet remarqua l’air contrarié de la sylvaine et pencha délicatement la tête à droite comme pour lui demander
ce qui la gênait.
Une idée germa dans l’esprit de l’Elfe.
« Dis moi, ça te dirait d’aller faire un tour au Museum avec moi ?
Si ça se trouve, tu pourras apprendre des choses sur les autres peuples qui te permettront d’améliorer encore
tes compétences de langage.
– Pounet ! »
Il acquiesçait joyeusement, sans réaliser qu’en réalité, la sylvaine comptait surtout sur le fait que peu voire pas
grand monde alentour ne connaissait d’Animalien de ce genre et que cela suffirait à leur octroyer un passe-droit.
Et c’est précisément ce qu’il se passa; le monde accourut pour découvrir l’étrange animal qui n’en était pas un
et elle en profita pour se faufiler et déambuler au gré des différentes salles afin de trouver quelque chose de
nouveau à étudier.
Quelques instants plus tard, elle découvrait une exposition à la gloire d’une créature gardienne de la nature et de
la chasse dont le nom, inscrit en lettres d’or sur une plaque de marbre, ne lui inspirait rien de connu.
« Faer Alag En Faras », répéta-t-elle pour elle-même.
« Il faut prononcer les r comme des l, quitte à jouer les cupides pour entrer à l’oeil, tu pourrais au moins respecter
le nom d’une créature que tu es censée adorer en tant que druidesse ! »
Zegrim, rouge de colère, n’avait pas mâché ses mots et faisait honneur au conflit ancestral entre ceux de son
espèce et les bouffeurs de verdure.
« Je vois pas en quoi je suis cupide, en plus, je viens pour accroître mes connaissances et mes compétences,
tu devrais plutôt être content vu que ça amènera plus de combats, plus de succès et donc plus de trésors.
– C’est pas une raison pour jeter un ami en pâture au grand public.
– Pou-pou-net ! »
Il avait l’air mécontent et triste; sa fourrure habituellement blanche ou argentée était désormais d’un bleu pâle et
triste.
« En plus, tu as abusé de sa naïveté et de sa gentillesse pour venir te renseigner sur ce qui semble clairement
n’être qu’un mythe, il suffit de voir la photographie pour se rendre compte que c’est un faux », grommela le Gnome
que l’Elfe n’avait, comme à l’accoutumée, pas aperçu.
Sous l’illustration gigantesque censée représenter Faer Alag En Faras, une petite vitrine accueillait divers crânes
d’animaux et une prétendue photographie de la créature, s’accompagnant de plusieurs lettres manuscrites
témoignant de la rencontre avec l’esprit.
« Il existe beaucoup de mythes différents au sujet de Faer Alag En Faras » précisa l’Humain qui les avait rejoint.
« Tu en as déjà donc entendu parler ? l’interrogea la sylvaine qui se demandait si le restant de la compagnie allait
aussi débarquer de la même façon.
– Vaguement, une histoire de femme, esprit, gardienne de la nature, mère des loups-garous, vengeresse sur
les bords. »
Le Gnome avait une moue et l’Elfe se demanda si c’était l’évocation d’un esprit vengeur qui l’inquiétait, lui dont
la nature lui conférait dès la naissance un lien à la magie notamment arcanique et donc un lien au monde des
morts et des esprits.
« Moi, tout ce que je peux en dire, c’est qu’aucun de ces crânes n’est le mien, il est encore bien fixé sur le reste
de mon corps… enfin de mes os quoi ! » s’amusa Sacdos, dont l’humour n’était toujours pas au goût de l’Elfe.
« Mais sois rassurée, ce n’est pas parce que divers mythes se confondent, s’opposent, s’entrelacent, qu’elle
n’existe pas; l’important reste toujours le message que ces mythes portent. »
Cette fois, c’était la Fée qui avait parlé, quoi que le verbe « parler » ne soit pas réellement de rigueur puisqu’elle
communiquait toujours par l’esprit.
Elle ne revenait toujours pas à l’Elfe, trop belle, trop cultivée, trop sage… trop, elle lui tapait sur les nerfs au moins
autant que le nabot barbu et puant qui s’était rapproché d’elle pour contempler d’un peu plus près l’espèce
d’autel à la gloire d’une guerrière de la nature, d’après ce qu’il avait compris.
« Comment je démêle le vrai du faux, là dedans ? interrogea soudainement Linaewen.
– Ben je peux te dire une chose, c’est que les petits crânes, là, ce sont des crânes de louveteaux.
Ils sont le symbole d’un clan chez les Nains et j’en ai vu assez pour pouvoir te le confirmer.
Après pour le reste…
– La photo est fausse.
Elle s’obtient facilement en modifiant un Tirmoalportré pour glisser un filtre avec une image en négatif juste entre
la lentille et l’objectif.
Et ensuite, on peut faire apparaître le prétendu esprit où bon nous semble. »
La sylvaine soupira; une guerrière vengeresse, gardienne de la nature et de la chasse, ça aurait été une super
découverte quand même.
« Je la trouve très inspirée de la Diane chasseresse quand même, en dehors des loups-garous… lança l’Humain.
– Sauf que si ma connaissance de vos mythes est bonne, Diane n’a rien d’un esprit ou d’une sorte de banshee.
Ici, elle me fait plutôt penser à ça, ne trouves-tu pas ? répondit le Squelette.
– Je pourrais demander son avis à la gardienne des âmes ? suggéra Elyona.
– ASSEZ ! »
Linaewen avait quasiment hurlé et ils se demandèrent si l’équipe en charge du Museum n’allait pas les renvoyer
dehors, à grand coup de bottes dans l’arrière-train.
Elle semblait outrée, insultée, par le fait qu’on ose comparer la créature à des divinités que l’on savait inventées.
Elle regarda l’illustration géante de plus près.
En bas à gauche du tableau, on apercevait un visage, proche d’un visage d’Humaine, partant en fumée, traînant
dans son sillage des crânes de loup et des loups, griffes sorties.
Faer Alag En Faras avait elle-même des griffes sombres en lieu et place des ongles humains; ses cheveux,
d’un blanc presque argenté rappelaient ceux du Haut Régent et de la majorité des Elfes ayant atteint un niveau de
connaissance et de sagesse plus qu’honorable.
Elle soupira.
Peut-être était-ce parce que la créature incarnait une partie de ce qu’elle voudrait être qu’elle avait tant envie de
la voir exister.
« Ou alors, c’est tout l’inverse et tu devrais t’en méfier comme de la peste ! déclara le Nain, comme s’il avait pu lire
dans ses pensées.
– Comment ça, tout l’inverse ?! s’indigna-t-elle.
Comment pourrais-je ne pas vouloir devenir une sorte d’ultime gardienne de la nature et de la chasse alors que je
souhaite devenir une druidesse ?
Ce serait incompatible ?
Il faudrait que je sois chasseresse, à la place ? »
Les autres se regardèrent, elle n’avait pas l’air de comprendre l’allusion qui leur semblait pourtant évidente.
« On cause de Mogredir », trancha froidement Gorda, qui était arrivée beaucoup plus discrètement qu’à son habitude.
Linaewen était estomaquée, choquée, avait envie d’hurler à nouveau mais ne pouvait nier la pertinence de la
remarque.
Les Elfes dotés de pouvoir fantastiques, réellement fantastiques, transcendant les lois de l’Astria, étaient pour la
plupart, des Elfes noirs, au service du Diable, et les créatures les plus malfaisantes qui puissent exister.
Elle posa un nouveau regard sur l’illustration.
Est-ce que cette fumée salvatrice, vengeresse, rédemptrice n’était pas plutôt les vapeurs d’une banshee punie,
maudite, corrompue, au service des ombres ?
Est-ce que cette créature que l’on voyait emporter des loups encore vivants et des crânes dans son sillage n’était
pas, contre ses précédentes attentes, l’expression d’un fléau qui avait tué les êtres vivants les plus honorés puisque
des Elfes jusqu’aux Nains, en passant par les Célestes, les loups étaient adorés et adulés de tous les peuples ?
N’était-elle pas, en effet, tout ce qu’elle devrait s’efforcer de fuir ?
« Si tu ne veux pas que j’interroge les Cats Sidhes, tu peux toujours poser la question à notre calligraphe préférée.
Avec un peu de chance, elle pourra même redessiner ton portrait, au passage. » lui suggéra Elyona.
En jettant un coup d’oeil au cadre doré de la toile, Linaewen remarqua qu’elle était signée Oeil Céleste.
« Il faudra cependant que tu saches faire preuve d’esprit critique, d’une aptitude à suspendre ton jugement.
Voilà un cadeau précieux à cette fin, garde-la toujours avec toi et prends-en grand soin. »
Elyona glissa dans la main de l’Elfe une clé à la forme singulière.
« Je la tiens d’un être qui m’est cher, que je porte en très haute estime.
Chaque fois qu’une croyance pourrait s’installer durablement en toi, reprends cette clé en main, elle t’ouvrira
les portes de pensées plus raisonnées et te protègera sans doute plus que tu ne le sauras jamais. »
La troupe quitta finalement le Museum d’histoire Ervaldienne sans en apprendre plus sur quoi que ce soit.
Le Pounet avait gagné quelques fans et une entrée VIP à vie pour les expositions, en plus d’une invitation à venir
parler de son expérience des malédictions une fois que la sienne serait levée.
Linaewen passa le restant de la journée et une partie de la nuit à converser avec Oeil Céleste.
Elle repartit avec son ancien portrait mais de nouvelles visions du druidisme, de la nature et de son rôle dans la
protection des espèces animales.
L’histoire et les personnages appartiennent à Julie -Animithra- FERRIER
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